Ces enfants qui ont souffert
Quand leur maman venait les voir
Par une après-midi très claire
Sur les fauteuils du parloir
Qui auraient préféré peut-être
Pour ne pas avoir mal au cœur
Qu'elle ne vienne pas à cette heure
Troubler leur pauvre solitude
Ils se retrouvaient seuls le soir
Dans leur lit dans le grand dortoir
Et pensaient à elle en pleurant
"Où es-tu donc, ô ma maman ?"
Et ils suçaient des sucres d'orge
En caressant de leurs dix doigts
Les bonbons et les chocolats
Qu'elle apportait dans sa panière
Ils sont des hommes maintenant
Mais gardent au fond de leurs yeux si grands
On ne sait quoi comme tristesse
Un chagrin qui toujours reste
Leur maman s'en est allée
Si peu de temps pour vous aimer
En nous tellement de regrets
Mon cœur est une pierre usée
Et ces années de pensionnat
Défilent par rangs de trois
Sur les chemins de leur mémoire
Les timides, on leur en fait voir
Ils sont toujours écorchés vifs
Leur vie où la tendresse niche
Est bousculée par la détresse
Humilié, faut que tu t' redresses
Les caporaux leur bottent les fesses
Les pions ont juste changé de veste
Dans la chambrée, c'est tout pareil
L'enfer sur la Terre, c'est réel
Si le dos est un peu voûté
Il a appris à encaisser
Je t'en supplie, dis-moi deux mots
Souris-moi pour que je vive
Fasse le Ciel qu'une dame
Au cœur tendre et diaphane
Vienne un soir dans ton dortoir
Pour t'aimer sans plus surseoir
Qu'elle t'apporte mieux qu' le Pérou
De la tendresse par-dessus tout
Qu'elle soit un peu ta maman
Et ton ciel et ton firmament
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